La vie d'Octave Sanspoux

Octave Sanspoux est à gauche

Thines en 1923 - Octave Sanspoux est à gauche

Hommage à Octave Sanspoux

 

Article paru en 1975

 

Se tient, jusqu'au 3 novembre, au Shopping Center de Nivelles, une exposition très spéciale, très particulière de photos inédites de Nivelles, avant, pendant et après la guerre.

Chacun se souvient-il encore d'Octave Sanspoux ?

Né juste à temps pour en gracir les deux dernières marches, Octave est fils du siècle dernier.

Ses études terminées à l'athénée de Nivelles, il sera au service d'une société d'assurances durant dix années pendant lesquelles, inconsciemment peut-être, il restera en lutte avec son tempérament d'indépendance.

De caractère optimiste, son heureuse philosophie de la vie le supporte, le soutient, le pousse sans cesse de l'avant vers "son idée". Il reste sagement tenace, l'esprit braqué sur l'avenir, celui qu'il souhaite. il sera photographe.

Nul dans son entourage ne s'étonnera de le voir, en 1923, prendre modestement place dans le commerce de la photo, rue de Soignies.

L'artiste s'affirme, et c'est en 1928, en même temps que son mariage, son installation en plus grand.

Là, au carrefour de la rue de Namur et du boulevard de la Fleur de Lys, trente-quatre ans plus tard, il prendra la décision de se ranger parmi les simples amateurs, après une vie professionnelle si magnifiquement remplie, si méticuleusement dessinée, si honnêtement réussie.

Entre-temps, il fondera le club photo " Les Mau Contint " qui deviendra plus tard " Entre-Nous ".

L'art de la photo, ce fut, en même temps pour lui, la maîtrise de la photo d'art. Il donna toute sa mesure, doublé de l'artiste-peintre qu'il était, en outre.

Non moins expert dans le dessin, de surcroît délicat humoriste, le père de Toine Culot trouve en lui un parfait collaborateur pour l'illustration de ses œuvres principales.

Dans cette exposition, il se devant donc que fussent en première place les souvenirs d'un temps proche encore pour certains, lointain déjà pour d'autres.

Ceux qui reconnaîtront les vues d'un Nivelles disparu se souviendront de leur auteur : coiffé de son démocratique "pinemouche", le regard fureteur, lèvres pincées, l'œil un tantinet moqueur derrière des bésicles à l'archaïque armature métallique, il déambulait en ville ou à la campagne, en quête d'une proie de choix, avec, en guise de gibecière, à l'épaule, toujours prêt au tir, son appareil photographique.

Loin d'encombrantes considérations architecturales, que n'a-t-il admiré, que n'a-t-il photographié, en tout temps, en toutes saisons, par le "trou" du parc, cette flèche de la collégiale éprise de pieuse audace dans son envol vers l'infini, cette flèche que nul ne reverra... tendre vers Dieu son bras puissant.

Campagne nivelloise, bois du Spluc, chapelle de Ronquières... le philosophe médite, se recueille, puise dans la reposante nature.

Au son des ritournelles du carillon, au son des heures égrenées par notre Vî Djan, il frissonne amoureusement.

Futé, encourant une répression impitoyable, il réussit à fixer sur papier la débâcle des occupants teutons de la "dernière".

Plus joyeusement, dans un Nivelles en délire, leurs pourchassants apparaîtront bien vite sur les pellicules.

Taf ! pour ceux qui l'ont approché, nous avons voulu que ces quelques "souvenances" à bâtons rompus, qu'en ces temps de Toussaint où l'on se souvient, son souvenir reprenne les tons chauds d'autmne qu'il affectionnait tant.

Un tel sillon ne fut heureusement pas créé en vain. Formé à la meilleure école, celle de son père, Pol repris la gibecière. Mais le Maître eut plus d'un disciple.

Et, l'honorant, c'est à l'initiative de deux artistes nivellois – Pol Sanspoux et Albert Hanse – que fut mise sur pied cette exposition dont nous ne pouvons assurer qu'un semblable pourrait encore être réalisée par la suite.

L'occasion, peut-être unique, vous est donnée de revoir le Nivelles d'hier, de voir la Nivelles d'aujourd'hui et d'admirer des œuvres sélectionnées de classe internationale.

 

 

Jacques Glibert

Paru dans le journal L'Aclot du 30 octobre 1975

Hommage à Octave Sanspoux

(poème de Gérard Delestienne-décembre 2012)

 

 

 

Dis-moi, mon cher Octave...
Dis-moi où est ta flèche,
Ton hôtel communal,
Tes précieuses bobèches,
Ton ancien arsenal,
Le château de Bouillon,
Ton circuit du grand prix,
Le baron au couillon,
Les discours de Bary.

Parle-moi de ton tram,
De Léon du Tiquet ;
Dis-moi ce qui se trame
A tes vieux tourniquets.

Quel était ce dos d'âne
Dont on fit un fier parc ?
Vois comment il se fane
Orphelin de ses barques.

Tes photos, cher Octave
Nous montre le passé ;
Que verrais-tu de suave
En ces nouveaux tracés ?

Et, où donc gît El Goch
Bravant la populace,
Bien avant que les boches
Ne brise ta grand-place ?

Où est l'abbé Caupain,
Qui aimait tant les sciences,
Et, ses petits calpins
Reprenant nos absences ?

Parle-moi d'Aigle Noir,
De champ d'aviation,
De Delcroix, du manoir
Au sort sans ambition !

Parle-moi d'Obélisque,
Des fêtes communales,
De Bila et ses disques,
De tes vieilles annales ;
Du couvent qui s'effrite,
Des jantes de Lambert,
D'Emile et de ses frites
Ou d'Itte et Childebert.

Qui sait ce qu'il advint
Des gens de la Brugeoise,
Des cours de l'abbé Vin,
Des familles bourgeoises
Promenant en carosse
Au temps de Dangonau,
Quand on chercha des crosses
Au comte, à Fonteneau.

Ô ma ville ! Ô Nivelles !
Voici qu'en nos mémoires
Tourne la manivelle,
Les pages du grimoire,
Où ton cher souvenir
Est intact en mon coeur ;
Le présent peut vernir
Avec tact, notre rancoeur,
Car à ton glorieux front
D'antan, plus rien, personne
Ne viendra faire affront
A Djan Djan quand il sonne.

Gary d'Els